[Libre] Journée pluvieuse

Journée pluvieuse
Vitaly & Alice
Alice avait terriblement froid. Elle était venue à l'Université pour passer un oral en philosophie, qu'elle avait d'ailleurs réussi haut-la-main par un étonnant miracle, et elle se retrouvait à devoir atteindre encore cinq heures pour avoir un écrit en sociologie. Elle adorait faire des études - enfin pas vraiment - mais elle détestait plus que tout les périodes d'examens. Elle passait le plus clair de son temps entre deux salles qu'à gratter du papier, et c'était bien une chose qu'elle trouvait insupportable. Alors pour l'occasion elle avait décidé de se promener un peu. Il faisait froid, parce que pour la première fois depuis plusieurs semaines la pluie s'abattait en trombes d'eau sur les toits d'Oxford. Ce n'était pas un souci pour la belle britannique, elle était habituée à la pluie, mais tout de même, elle détestait avoir cette sensation de froid sur la peau et de ne pas réussir à la chasser.
Ce temps expliquait sans doute l'impression de solitude qui émanait des couloirs de l'établissement. Elle avait l'impression que tous les étudiants s'étaient fait la mal, se réfugiant dans la bibliothèque ou au restaurant universitaire. Pour sa part Alice se dirigeait plutôt vers le pont des Soupirs. Sa salle d'examen était à quelques mètres de là et elle savait que c'était un endroit tranquille. Pour fumer une cigarette par exemple, une envie dévorante, mais qu'elle ravalait, refusant de se retrouver sous la pluie pour cela. Elle arriva sur les lieux, prenant une cigarette dans son paquet, et son fidèle briquet. Mais alors qu'elle tenta de le faire marcher une fois, deux fois... Cinq fois elle dût se rendre à l'évidence : il était mort.
Elle se rendit compte alors de la présence d'un autre étudiant sous le pont qui fumait allègrement une cigarette lui aussi. La jeune britannique se dirigea vers lui d'un pas assuré. « Excuse moi, tu aurais du feu ? Mon briquet m'a lâchement abandonné... » demanda-t-elle en lui montrant la relique de ce qui était son sauveur jusqu'à présent. Elle entendit alors un petit miaulement en vit quelque chose bouger dans la veste du bel étudiant blond. Un Russe peut être ? Ou un Allemand... Son visage ne dit rien à Alice, et elle se demanda s'il n'était pas nouveau dans l'université. Après tout il y avait des arrivés toutes l'année à Oxford. « C'est un chat que tu caches ? Le tiens ? »  Elle sourit, présentant sa main à l'inconnu : « Je m'appelle Alice Kensington, et tu es ? » 

Journée pluvieuse
Vitaly & Alice
Il était adorable. Il avait un air innocent et gentil sur le visage, et elle n'avait encore jamais vu cela chez un garçon. Et pourtant elle en avait côtoyé des garçons, cela dit ils étaient souvent imbus d'eux-même, impolis, voir carrément prétentieux et désagréables. Elle était habituée à les regarder de haut et à leur rappeler qu'elle était une Lady avant tout et qu'elle avait le droit au respect qu'il lui était dû. Mais jamais encore elle n'avait parlé avec un garçon qui avait un visage aussi doux et aussi tendre. Il était courtois, cela se voyait sur lui. Il se figea un instant lorsqu'elle arriva mais très vite en comprenant qu'elle n'était qu'une élève il se détendit. Elle venait chercher auprès de lui un briquet, et il lui tendit sa cigarette. Elle fut si étonnée qu'elle n'osait même pas bouger. « Tu veux la mienne? Je l'aurais pas finis de toute façon... » Elle bafoua quelques mots de remerciement et utilisa sa cigarette entamée cela dit pour allumer la sienne. Ils ne fumaient pas la même marque, et elle avait du mal à changer d'un seul coup. Elle écrasa la cigarette du jeune homme dans le cendrier portatif qu'elle avait sur elle, et qu'elle jettera une fois dans un endroit approprié à cette effet. « Je te remercie c'est gentil. »  Dit-elle en souriant.
Elle remarqua ensuite le chat qui se lovait contre l'élève et lorsqu'elle lui demanda s'il était à lui il se mit à rire. Elle fronça les sourcils, ne sachant comme elle devait le prendre. « Non il n'est pas à moi. C'est Simpkin, le chat de la fac. Il est juste venu se réfugier dans mes bras pour un peu de chaleur. » « Oh ! Je vois. Il est adorable en tout cas. »  Elle se pencha vers lui pour caresser un peu la boule de poils, mais celle-ci renifla sa main et la feula. « Et oui je sens le chien, je sais. Ce n'est pas très agréable hein ? »  Elle se mit à rire, et elle tira une bouffée sur sa cigarette.
Elle lui demanda comme il s'appelait alors qu'elle se présentait. Elle aimait faire de nouvelle connaissance, elle n'était pas l'une des filles les plus connues de l'Université pour rien. Elle était Alice Kensington, connue comme le messie, et redouté comme lui également. Intriguée par la présence d'un garçon - sans nul doute étranger au vue de son accent - dans un endroit pareil un dimanche pluvieux elle ne pouvait que s'arrêter. Elle s'assit à côté de lui alors qu'il venait de lui serrer la main. « Vitaly Vasili... Ravi de vous connaitre Mademoiselle Kensington. Que faites vous ici un dimanche ? » Elle tira encore une bouffé sur sa cigarette. « Il n'y a jamais de dimanche pour les professeurs, et encore moins durant la fin de l'année. J'ai un oral à passer cet après-midi. Et toi ? » demanda-t-elle d'une voix amicale et douce, ce qui n'était pas dans ses habitudes quand on la connaissait bien. « Tu viens d'où ? Tu as... un petit accent assez mignon quand tu parles. Tu es à Oxford depuis longtemps, je ne t'ai jamais vu. » 

Journée pluvieuse
Vitaly & Alice
Alors adorait les étudiants étrangers. Faisant parti du Comité d'Accueil de l'université politique, philosophique et de sciences humaines, elle avait la chance de pouvoir en accueillir une quantité non négligeable dés le début de l'année scolaire. Mais bien souvent passé les périodes de Noël le Comité devenait plus calme, et à part un séjour pendant les vacances de Printemps ils arrêtaient bien souvent l'accueil des étrangers. C'est sans doute pour cela qu'elle n'avait pas encore eu la chance de croiser Vitaly. Ou alors peut être qu'il n'étudiait pas dans son université, et cela l'expliquait encore mieux.
Oxford est une petit ville, quant bien même plusieurs milliers d'étudiants venaient faire leurs études ici chaque année. Ce n'était pas bien compliqué de connaitre tout le beau monde. Quand on y pense une bonne majorité étaient en réalité des boursiers ou des étudiants qui laissaient leurs parents s'endetter pour pouvoir étudier dans cette université prestigieuse. Ce n'était pas le cas des étudiants riches, qui venaient de famille de la haute noblesse anglaises, reconnaissable par leurs manières fortes convenables et leurs prestances sans égale. Alice connaissait toutes ces familles qu'elle côtoyait lors de soirée mondaine, et durant des fêtes illégales dans les sous-sols des bars de la ville. La jeunesse dorée n'était pas en reste dans cette ville.
Pour l'heure elle faisait la connaissance d'un joli garçon. « Oui je viens de Russie. Je suis arrivé il y a quelques mois. Mais j'ai pris beaucoup de retard dans les cours puisque le programme est complètement différent ici. Du coup cette année je terminais juste avec les autres mais je commence vraiment mon année qu'à la rentrée prochaine. Alors il y a des jours comme ça où je m'ennuis un peu et je me ballade dans le coin. » La Russie... Un pays où elle n'avait été qu'une seule fois pour visiter Moscou lorsqu'elle était encore enfant. Un des rares voyages de plaisance qu'elle avait pu faire avec son père. Elle avait de vague souvenir de la Capitale Russe, et ils étaient forts agréables. Elle se souvenait d'un pays marqué par la rigueur de ses habitants et de son climat. Elle n'y avait jamais remis les pieds, mais elle en rêvait encore parfois. Elle acquiesça face aux explications du jeune homme. Il était typé comme un Russe bien qu'il sembla être bien plus aimable et agréable à vivre. Elle sourit. « Et pour le moment tu te plais à Oxford ? » demanda-t-elle, désireuse de faire la conversation. Cela lui permettait de passer le temps avant son prochain oral, et ce n'était pas plus mal. Surtout que le jeune homme était très intéressant et agréable.
« Je ne connais pas encore grand monde ici, mon père m'a envoyé ici pour mes études mais je suis venu seul. Du coup je reste souvent seul. »  Confessa-t-il à la jeune anglaise, et elle en fut touchée en réalité. Elle décida alors de le tester pour voir s'il aurait le mérite de rentrer dans son cercle privé. Elle choisissait ses connaissances avec beaucoup de soin, car elle ne voulait pas s'entourer de personnes qui seraient d'un rang inférieur au sien. Elle avait de l'argent, beaucoup d'argent, et une prétention qui n'avait que peu d'égal même ici. Elle était connue pour cela. Elle était incroyablement prétentieuse et orgueilleuse. « Tu devrais passer au
Camera Night Club le Jeudi soir. Ils organisent des soirées étudiantes fantastiques. J'y suis constamment avec quelques ... membres très sélect' de cette université. Nous serions ravis de te trouver à notre table. »  Proposa-t-elle avec un air un peu plus suspicieux vers le jeune homme pour voir la manière dont il réagissait. Serait-il habitué à de telle invitation, les prendrait-il bien ? A Oxford tout est une question de réputation. La réputation et les contacts sont au moins aussi importants que le travail et les diplômes lorsque l'on sort d'ici. « Tes parents travaillent dans quel domaine ? » 

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Vitaly & Alice
De toutes les villes qu'elle avait pu visiter, Alice préférait néanmoins Oxford. Depuis qu'elle était arrivée à l'Université elle avait réellement trouvé un équilibre, un monde dans lequel sa place était bien définie. Elle était la reine des abeilles certes, mais loin d'être une reine haïe ou détestée, elle était aimée de la majorité de ses sujets . Si la grande majorité des étudiants avaient déjà entendu parler d'elle, ceux qui l'avaient rencontré ne tarissaient pas d'éloge à son sujet. Il faut dire que la jeune femme sait se montrer charmante et gentille. Surtout aux premiers abords. D'une nature curieuse elle pose des questions qui mettent les autres au centre d'une attention qu'ils apprécient en général, et elle les invite toujours dans les lieux à la mode où elle a sa place réservée.
Mais plus encore la ville d'Oxford est charmante. Majoritairement piétonne, on y trouvait tout ce qu'il fallait pour vivre dans une atmosphère guidée et très à l'ancienne. Une chose qu'elle appréciait particulièrement dans un monde où la majorité du temps les gens se contentaient de ce qu'il y avait de plus médiocre. Elle était tombée amoureuse de cette excellence dans tous les domaines. « Oh ça va, c'est une belle ville. Mais c'est très différent de chez moi. Enfin au moins le climat est un peu meilleur ici. » Elle sourit, ravie d'apprendre que le nouvel élève se trouvait à sa place dans la région. Elle adorait voir que cette ville plaisait, avec une certaine fierté elle se présentait souvent comme originaire d'Oxford. Quant bien même elle était née à Londres dans la réalité. Elle se sentait Oxfordienne dans l'âme. Pour le moment du moins.
Passant sur un autre sujet elle invita le jeune homme à une soirée, comme dans son habitude pour accueillir les nouveaux qu'elle rencontrait. Cela lui faisait toujours une bonne publicité, sans compter que Vitaly semblait véritablement adorable et charmant. C'était une qualité rare qu'elle appréciait beaucoup. Mais cela n'arrêtait pas la jeune femme dans ses investigations concernant le jeune homme et elle en vint à lui demander ce que ses parents faisaient dans la vie. « Ils sont médecins... enfin mon père est dans la médecine. Ma mère est biologiste, d'où aussi le fait que je sois en biologie. » Elle acquiesça. « Mon fiancé est professeur de Biologie ici à Oxford. » Dit-elle, comme si ce point commun pouvait excuser une amitié entre eux, ou un simple lien. Mais c'était tout de même assez amusant.
« C'est pour ça que je suis là. Ils m'ont payé un bon appart ici en plus de l'avion pour venir... » Elle sourit, c'était géniale de voir des parents aussi investis dans la réussite de leur enfant. Pour sa part sa place à Oxford tenait à un rendez-vous d'affaire avec le doyen, et un peu de charme de sa part pour trouver sa place dans ces rangs. Elle ne pouvait pas compter sur son dossier plus que moyen. Enfin pas vraiment, mais Alice n'était pas de ces élèves excellents qui arrivaient toujours premier de la classe. Elle avait été dans des lycées privés et réputés, mais elle restait dans le milieu supérieur des élèves. Sans plus. Elle était dans la moyenne. « Mon père a une entreprise de communication assez importante. Il est chargée de communication de la famille Royale d'Angleterre, et de plusieurs célébrités à travers le monde. Si je suis ici c'est parce qu'il est un ami proche du Doyen... »  avoua-t-elle comme si c'était un crime, et qu'elle n'avait pas vraiment sa place ici. Elle ne parla pas de sa mère décédée. De toute façon cela ne servirait pas à grand chose, elle n'aimait pas en parler. « J'imagine que tes parents sont très fiers de toi. C'est cool qu'ils te soutiennent. » 

Journée pluvieuse
Vitaly & Alice
Oxford n'était pas une université comme toutes les autres. Elle était prestigieuse, certes, mais surtout elle était emprunte d'une esprit anglais très particulier. L'école avait été fondée par le roi pour quelques privilégiée qui avaient des titres de noblesse, et pour Alice l'Université n'avait jamais vraiment perdu cette première fonction. Elle était là pour recevoir les étudiantes de la haute société anglaise pour qu'ils se fassent un nom, une réputation, et un carnet d'adresse. C'était une opportunité incroyable que de se retrouver de nom aussi prestigieux, et pour sa part elle pouvait se vanter de faire partie de ces enfants de la haute société. Ils étaient facilement identifiables : riches, imbus d'eux-même, toujours très bien habillé, présents à toutes les soirées, et suivis sur les réseaux sociaux. Ils ne perdaient jamais une seule occasion de se montrer, de se faire voir, de se faire aimer des autres.
Mais Oxford s'était démocratisé, et aujourd'hui la haute société côtoyait les boursiers, et les enfants de famille à revenu moyen. Ceux-là se voyaient souvent obligé de demander des emprunts pour payer ces études de prestige. Alice n'avait rien contre les élèves boursiers, mais elle ne trouvait pas d'intérêt à les côtoyer. Cela ne lui servirait sans doute pas plus tard, dans son carnet d'adresse, alors pourquoi s'en approcher et prendre le temps de s'en faire des amis ? « Je... je t'ai mentis Alice désolé. Mes parents ne sont pas... mon père est un simple ouvrier en Russie. Il a du travailler dur pour m'envoyer ici. Et ma mère... elle s'est faite tué dans une fusillade quand j'étais tout petit. Je suis pas riche. J'ai même pas d'appartement à moi je suis dans les résidences de l'université... Je suis pas comme toi ou les autres que tu fréquente. » Elle resta un instant sans bouger et sans parler devant Vitaly. Tout d'abord elle se sentit vexée d'apprendre qu'il lui avait menti de la sorte. Ensuite, elle se sentait honteuse de s'être laissé bernée aussi facilement. Et pour cause elle n'était pas du genre d'habitude de croise aussi facilement les gens. Enfin elle était compatissante d'apprendre qu'il avait aussi perdu sa mère, sans sans doute ne dira-t-elle aucun mot sur le sujet. Il était de la basse société russe. Et en plus il n'avait pas le craint de tenir son rôle. « Désolé de t'avoir mentis.... » Elle inspira et leva les yeux au ciel. « Le mensonge est monnaie courante à Oxford. » Dit-elle en haussant les épaules, et en se relevant. Elle ne voyait pas vraiment pourquoi elle resterait soudainement avec cet homme. Mais elle se sentait aussi d'humeur généreuse alors elle se tourna vers lui et eut envie de lui apprendre quelques petites choses sur l'Université : « A Oxford il existe deux types de personnes. Celles qui comprennent très vite les règles du jeu, et celles qui restent sur la touche. Personne ne te connait ici, tu peux être qui tu veux, mais tu dois très vite apprendre à garder ton rôle. Personne ne te prendra en pitié, personne n'aura de compassion avec le pauvre petit enfant russe ici. Tu veux devenir quelqu'un d'important, alors apprends à jouer ton rôle jusqu'au bout. »