Poutine ? On l'emmerde. ~ Gwaine & Sasha

« Et je vous souhaite bonne chance pour les partiels ! N’hésitez pas à m’envoyer un mail si vous ne comprenez pas un point du cours ! »

Dernier cours de l’année, c’est enfin terminé. J’essuie le grand tableau derrière moi sous le bruit des conversations et des chaises que l’on fait trainer. L’année est terminé pour moi, j’aurai des copies à corriger mais après, adios l’université. Je pourrais pleinement profiter des vacances, tout en me limitant aux rendez-vous les plus importants. La plupart du temps, je laisse les patients tranquilles pendant l’été et je les reprends au mois de septembre. S’ils n’ont pas rechuté, ils sont en bonne voie de guérison. S’ils ont rechuté, je devrais redoubler de séance. Mais bien souvent, sachant que je leur fais pleinement confiance, ils ne rechutent pas et guérissent rapidement. Le dernier élève quitte l’amphithéâtre et je fais le tour afin de voir si personne n’a rien oublié. Pour une fois tout est propre, pas de stylo, rien. Comme quoi avec le mois de juin, les élèves s’assagissent. Je retourne à mon estrade afin de récupérer mes affaires et je sors. Je rencontre quelques collègues, j’échange quelques banalités avec eux puis je rentre chez moi au volant de mon Range Rover.

J’arrive vers 19 heures, accueillie par mes deux chiens fous. Vraiment fous. Je pose juste mon sac et je ressors pour les promener. Après une demi-heure au parc, je rentre afin chez moi et je mange. J’ai tellement faim mon dieu. Je mange une pizza devant une émission télé débile. Mais vraiment. Mais le truc avec ce genre d’émission, c’est qu’on regarde jusqu’au bout pour savoir pour John a trompé Lily avec Shana. Complètement con. Tout ça est orchestré, rien n’est vrai. Mais ils réussissent leur but premier à merveille : faire que les gens regardent. Une fois ma pizza terminé, je coupe la télé et allume mon enceinte afin de mettre la musique à fond. Car ce soir, c’est jour de fête. Je sors avec un ami, un russe. On s’est bien trouvé. On ne supporte pas Poutine. On a fui la Russie. Bref, je l’aime bien ce Gwaine, il me fait rire. Et les soirées avec lui sont toujours pleines de rebondissement. On joue à savoir lequel de nous insultera le plus de gens possible en russe. Oui, lorsqu’on a bu, nous perdons notre cerveau. Je mets de la musique et vais donc dans ma salle de bain, me démaquille et file dans la douche. Je me douche tout en chantant à tue-tête. Je sors de la pièce embuée, Une serviette autour de mon  corps et une autre sur ma tête, sous les regards effrayés de mes chiens. Je file dans ma chambre, tout en dansant afin de me préparer. J’enfile un chino noir, mes baskets blanches montantes et une blouse à manche courte que je rentre dans mon pantalon. Après tout, on ne va que dans un bar, je ne vais pas mettre une robe. Je sèche mes cheveux et je les laisse tomber en cascade sur mes épaules. Eye-liner, mascara et rouge à lèvre bordeaux, et me voilà prête. 21 heures, il est temps d’aller retrouver Gwaine.

Avant de partir, je prends un petit sac que je porte en bandoulière et j’y mets mon portable, mon liquide et mes papiers important. Ma veste en cuir et je peux enfin y aller. Il va râler. Je suis en retard. J’y vais à pied, je n’arriverais pas à ramener ma voiture de toute façon. Je marche assez vite, ne voulant pas me rendre plus en retard que je ne le suis déjà. J’arrive enfin au Bridge Club, lieu où on ne sait encore pas fait virer et j’entre. Je cherche Gwaine du regard et je le trouve enfin. Je m’approche de lui un fois devant lui, je me penche et lui fait la bise avant de m’asseoir en face de lui.

« Priviet ! Comment tu vas ? »

Je suis essoufflée. Rouge. Je vais mourir. Je m’évente avec la carte des cocktails.

« J’adore cet endroit ! Vivement minuit, apparemment l’ambiance change. On va encore se faire virer J’espère que tu sais jouer au Bridge »

Je lève un sourcil entendu vers lui, ayant enfin repris mes esprits. Puis j’appelle la serveuse en levant la main. Cette soirée s’annonce déjà parfaite.


   

A Oxford, les russes ne courraient pas les rues, je dois malheureusement l’admettre. Il n’y avait pas d’association de russes, pas de club d’admirateur de la vodka ou je ne sais quoi. A ma connaissance, il n’y avait que Gwaine, en plus de moi. Et rapidement, on est devenus amis. Et rapidement, les bars et boites de la ville ont commencé à nous haïr. A chacune de nos sorties, on finissait par se faire virer à grands coups de pieds au cul. J’exagère à peine. On est devenus leurs bêtes noires, bien qu’on consomme beaucoup, beaucoup, d’alcool. Souvent, on tournait à deux bouteilles de vodkas. Ajoutez à ça quelques bières histoire de se déshydrater. On est russes. La vodka coule dans nos veines dès la naissance alors bon. Mais non, ça partait toujours en vrille. Soit on se mettait à danser sur les tables, soit on chantait à tue-tête, soit on commençait un strip-tease enfin que des trucs du genre. Et ce soir au bridge club, je compte bien foutre la merde autour des tables, jouer tout en perturbant et faisant chier les autres. On va essayer de ne pas se faire virer. Essayer. Nous connaissant, c’est pas gagné. Surtout que c’est la fin de semaine. Fin des cours. Fin de tout. Il faut fêter tout ça et réveiller tout Oxford.

Bien évidemment, Gwaine était arrivé le premier. Je suis une femme. C’est dans nos gênes d’être en retard, pas vrai ? Je le remarque aussitôt et cours limite vers lui. Je lui la bise, le prends dans une courte étreinte et je m’assoie en face de lui en lui demandant comment il va. Il me dit que ça va et je lui souris. Il me demande si je suis contente d’être en vacance et je m’empresse de lui répondre :

« Ça va bien, merci. Et je ne suis pas en vacance moi Monsieur, je te signale que j’ai un cabinet et des patients, même pendant l’été. »

Je ris doucement, il rit plus fort et je me sens bien. Je me sens à ma place, je suis juste bien. Heureuse de pouvoir profiter d’une soirée avec un de mes plus proches amis. Il évoque alors le fait que l’on se fasse souvent virer et j’acquiesce de la tête.

« Je ne suis jamais venue non plus mais j’ai eu des retours. De sacrés retours.»

J’hausse un sourcil et fais un sourcil charmeur avant d’exploser de rire. C’est Gwaine. Il est comme mon meilleur ami gay. Sauf qu’il n’est pas tout à fait gay. Mais je sais qu’il est là pour moi et je sais aussi que ma vie serait fade sans lui et sa bonne humeur constante. Je lui demande quand même au cas où s’il sait jouer et il réfléchit un instant puis finit par me dire que son père lui a appris les bases. Puis il me demande comment est-ce qu’on va pimenter le jeu. Je réfléchis un instant avant de répondre:

« Je pense que ça pourrait être pas mal de s’incruster à une table. Avec mon charme fou, ils diront oui »

Je rejette mes cheveux en arrière d’un geste théâtral avant de répondre :

« Et on se fera passer pour un riche couple de russes. On jurera en russe. Et après, à toi de me dire Camarade ! »

J’accentue bien le mot camarade avec un bon accent russe. Gwaine appelle un serveur qui vient aussitôt et il commande un seau vodka-RedBull. Bien que je ne dilue pas ma vodka, personnellement. Le RedBull sera si jamais on a soif, histoire de ne pas se déshydrater à la vodka. Une fois le serveur reparti, mon ami se retourne vers moi et me complimente. Je fais semblant de glousser en pliant mon poignet devant moi à la manière d’une collégienne.

« Oh arrête, c’est toi qui vas me faire rougir. Mais merci du compliment, t’es pas mal non plus dans ton genre »

Je lui fais un clin d’œil et je ris. Le genre de rire pas glamour du tout. DU TOUT. Le serveur revient avec la bouteille de Grey Goose et deux verres. Il pose le ticket sur la table et je lui tends directement un billet afin de le payer.

« Gardez le reste, ça fera votre pourboire »

Il me sourit chaleureusement, à la limite choqué, avant de repartir. J’ouvre la bouteille et je remplis nos verres à moitié. Puis je demande à mon compatriote :

« Tu la bois pure ou tu veux diluer pour commencer ? »



   

Gwaine est un ami précieux. Il sait me faire rire, il me remonte le moral et rien de mieux que d’être comprise par quelqu’un qui est comme soit. On a tous les deux fuit notre pays, nous sommes tous les deux contre Poutine et je sais qu’avec lui, je peux parler librement sans avoir peur d’être jugée. Et j’aime ces soirées avec lui, même si la plupart temps on se fait virer. Ouais, on ne dirait pas que je suis une psychologue de renommée internationale doublée d’une prof lorsque je sors avec Gwaine en ville. Il est cette part de folie et de jeunesse en moi. Et c’est pour ça que je l’aime autant. Il se moque de moi et je me penche vers lui afin de lui donner une légère frappe sur l’épaule, enfin de rire doucement.

« Mon boulot n’est pas trop difficile, enfin pour moi, alors ça me va »

Je lui raconte ensuite les retours que j’ai eu sur cet endroit, de très bons retours. Puis je poursuis en disant que j’userais de mon charme pour que l’on puisse s’incruster. Il faut bien que ces seins servent à quelque chose non ? Dramatique et joueur, il se lamente sur les non-atouts des hommes et je ris. Il a raison le petit. Nous femmes, nous sommes manipulatrices. Que celle qui ne l’a jamais fait me jette la première pierre. Nous rions et je me sens à ma place. Je ne suis pas la psy. Je ne suis pas la prof de psycho. Je suis juste Sasha, une femme qui rattrape la jeunesse qu’elle n’a pas eue avec un ami. Un excellent ami. Il proclame la Sainte Vodka et je ris de plus belle avant de dire en russe :

« A la Sainte Vodka ! Et à la tienne surtout ! »

Aussitôt commandée, aussitôt là. La divine boisson des russes. Et qu’on se le dise, mélanger ce nectar divin avec du diluant, c’était un crime. Puni par le goulag secret de Poutine. Ouais, je suis sure que ça existe encore. Mon partenaire me confirme qu’on ne mélange pas la vodka et je termine donc je lui servir son verre pur, avant de le lui donner.

« Amuse toi dont avec lui, j’suis sure qu’il ne te dirait pas non »

J’hausse un sourcil aguicheur avant de trinquer avec lui, grand sourire. Je bois tout mon verre et je laisse le liquide me brûler doucement la gorge. Bordel ce que c’est bon. Ça c’est fait. C’est ça être russe, vider des verres entiers en une gorgée. JE nous resserre des verres et il porte un toast à nous et refait son éternelle blague sur Poutine je pouffe avant d’ajouter :

« Et puisse-t-il ne jamais être libre de nouveau ! »

Je lève mon verre et avale mon deuxième verre de la même façon de que le premier. Je ressens rien, la vodka fait partie de moi. Il reste pas mal de temps avant que le club dévoile son vrai visage fait de jeu de cartes et d’argent. Alors je décide de parler banalité avec mon russe d’ami.

« Alors dis-moi Gwaine, quoi de neuf sinon ? Ça fait quoi ? Deux semaines qu’on s’est pas vus ? »

Je bois mon verre plus lentement ce coup-ci, observant les gens alentour. Le club se remplit petit-à-petit de vieux riches. Parfait